Communiqué

Décision n° 2022-840 DC du 30 juillet 2022 - Communiqué de presse

Loi mettant fin aux régimes d'exception créés pour lutter contre l'épidémie liée à la covid-19
Conformité

Le Conseil constitutionnel juge conformes à la Constitution des dispositions de la loi mettant fin aux régimes d'exception créés pour lutter contre l'épidémie liée à la covid-19

Par sa décision n° 2022-840 DC du 30 juillet 2022, le Conseil constitutionnel s'est prononcé sur certaines dispositions de l'article 3 de la loi mettant fin aux régimes d'exception créés pour lutter contre l'épidémie liée à la covid-19, dont il avait été saisi par plus de soixante députés.

Les paragraphes I et II de cet article permettent au Premier ministre, dans l'intérêt de la santé publique et aux seules fins de lutter contre la propagation de l'épidémie de covid-19, de réglementer les déplacements à destination du « territoire national » en provenance de pays étrangers ou de l'une des collectivités mentionnées à l'article 72-3 de la Constitution et les déplacements à destination de ces mêmes collectivités.

Plus particulièrement, le paragraphe I permet au Premier ministre d'imposer aux personnes âgées d'au moins douze ans qui souhaitent se déplacer à destination du « territoire national », en provenance de pays étrangers ou de l'une des collectivités mentionnées à l'article 72-3 de la Constitution affectés par l'apparition et la circulation d'un nouveau variant de la covid-19 susceptible de constituer une menace sanitaire grave, de présenter le résultat d'un examen de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la covid-19.

* En premier lieu, les députés requérants soutenaient que l'emploi des termes « territoire national » au paragraphe I de l'article 3 était erroné, qu'il excluait les collectivités d'outre-mer et ne visait que le territoire hexagonal. Il en résultait selon eux une méconnaissance du principe de clarté de la loi et de l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi.

Par sa décision de ce jour, le Conseil constitutionnel rappelle que l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi, qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, impose au législateur d'adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques.

À cette aune, le Conseil constitutionnel juge que, en employant les termes de « territoire national », qui désignent le territoire hexagonal, la Corse et les collectivités d'outre-mer et qui ne sont ainsi ni imprécis ni équivoques, les dispositions contestées permettent au Premier ministre de réglementer les déplacements en provenance d'une collectivité d'outre-mer vers une autre de ces collectivités ou vers une autre partie du territoire national. Il écarte par ces motifs le grief tiré de la méconnaissance de l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité.

* En second lieu, les députés requérants reprochaient aux dispositions du paragraphe I de l'article contesté de permettre au Premier ministre de réglementer les déplacements en provenance des collectivités d'outre-mer et à destination du territoire hexagonal en cas d'apparition d'un nouveau variant sur le territoire de ces collectivités, sans prévoir cette même possibilité pour les déplacements vers ces collectivités en cas d'apparition d'un nouveau variant sur le territoire hexagonal. Il en résultait selon eux une différence de traitement injustifiée selon le lieu d'origine du déplacement.

Le Conseil constitutionnel rappelle que, selon l'article 6 de la Déclaration de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ». Le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit.

Au regard de ce cadre constitutionnel, il relève que, si les dispositions contestées du paragraphe I de l'article 3 ne prévoient pas la possibilité pour le Premier ministre d'imposer la présentation d'un résultat de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la covid-19 aux personnes souhaitant se déplacer à destination des collectivités d'outre-mer en provenance du territoire métropolitain en cas d'apparition et de circulation, sur ce territoire, d'un nouveau variant de la covid-19 susceptible de constituer une menace sanitaire grave, toutefois, le paragraphe II de cet article permet au Premier ministre d'imposer cette mesure aux personnes souhaitant se déplacer à destination de l'une des collectivités d'outre-mer en cas de risque de saturation du système de santé de l'une de ces collectivités. Or, l'apparition et la circulation, sur le territoire métropolitain, d'un nouveau variant de la covid-19 susceptible de constituer une menace sanitaire grave est nécessairement de nature à caractériser un tel risque.

Par ces motifs, le Conseil constitutionnel juge que le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant la loi ne peut qu'être écarté.

Le Conseil constitutionnel juge en conséquence conforme à la Constitution le premier alinéa du paragraphe I de l'article 3 de la loi mettant fin aux régimes d'exception créés pour lutter contre l'épidémie liée à la covid-19.