Décision n° 2021-820 DC du 1er juillet 2021 - Communiqué de presse
Le Conseil constitutionnel valide la plupart des dispositions d'une résolution modifiant le règlement du Sénat tout en assortissant d'une interprétation neutralisante son article 2 et de réserves d'interprétation plusieurs autres articles
Par sa décision n° 2021-820 DC du 1er juillet 2021, le Conseil constitutionnel s'est prononcé sur la résolution visant à améliorer le suivi des ordonnances, rénover le droit de pétition, renforcer les pouvoirs de contrôle du Sénat, mieux utiliser le temps de séance publique et renforcer la parité.
* Au nombre des dispositions de cette résolution visant à améliorer le suivi des ordonnances, la décision de ce jour se prononce en particulier sur son article 2 prévoyant qu'au début de chaque session ordinaire, puis au plus tard le 1er mars suivant, ou après la formation du Gouvernement, ce dernier informe la Conférence des Présidents « des projets de loi de ratification d'ordonnances publiées sur le fondement de l'article 38 de la Constitution dont il prévoit de demander l'inscription à l'ordre du jour du Sénat au cours de la session ».
Le Conseil constitutionnel juge que ces dispositions ne font pas obstacle aux prérogatives que le Gouvernement tient du premier alinéa de l'article 48 de la Constitution. En particulier, les informations susceptibles d'être ainsi données par le Gouvernement, qui n'ont qu'un caractère indicatif, ne le lient pas dans l'exercice de ces prérogatives.
S'agissant des dispositions de ce même article 2 prévoyant que le Gouvernement informe la Conférence des Présidents des ordonnances qu'il envisage de publier au cours du semestre, le Conseil constitutionnel relève que cette information vise à faciliter le suivi par le Sénat des habilitations que le Parlement a consenties en application de l'article 38 de la Constitution et de l'inscription à l'ordre du jour des projets de loi de ratification des ordonnances. Dès lors, cette information participe à la mise en œuvre du premier alinéa de l'article 24 de la Constitution aux termes duquel « Le Parlement vote la loi. Il contrôle l'action du Gouvernement. Il évalue les politiques publiques ». Par la voie d'une interprétation neutralisante, le Conseil constitutionnel juge toutefois que les informations susceptibles d'être ainsi données par le Gouvernement sur le calendrier prévisionnel de publication de ces ordonnances, qui n'ont qu'un caractère indicatif, ne lient pas celui-ci dans l'exercice de la compétence qu'il tient de l'article 38 de la Constitution.
* S'agissant des dispositions visant à mieux utiliser le temps en séance publique, le Conseil constitutionnel s'est notamment prononcé sur l'article 10 de la résolution prévoyant que « pour l'examen d'un texte élaboré par une commission mixte paritaire, sauf décision contraire de la Conférence des Présidents, seuls peuvent intervenir le Gouvernement, le représentant de la commission saisie au fond pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes et, pour explication de vote, un représentant par groupe pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes chacun ainsi qu'un représentant des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe pour une durée ne pouvant excéder trois minutes ».
Par une réserve d'interprétation, le Conseil constitutionnel rappelle qu'il appartient au président de séance d'appliquer ces différentes limitations du temps de parole et à la Conférence des présidents d'organiser, le cas échéant, les interventions des sénateurs en veillant au respect des exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire. En outre, ces dispositions ne confèrent pas à la Conférence des présidents la faculté de limiter le temps de parole du Gouvernement.
Le Conseil constitutionnel s'est également prononcé sur l'article 11 de la résolution réduisant à deux minutes les durées d'intervention d'un sénateur ou du rapporteur en séance, lors du débat sur les exceptions, questions, motions ou demandes de priorité, pour la présentation d'un amendement ou d'une explication de vote sur un article ou lors de l'examen en séance d'un texte examiné de manière partielle selon la procédure de législation en commission. Par une autre réserve d'interprétation, le Conseil constitutionnel juge qu'il appartiendra au président de séance d'appliquer ces limitations du temps de parole en veillant au respect des exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire.
Il énonce une réserve d'interprétation analogue pour la mise en œuvre de l'article 13 de la résolution prévoyant que, lorsque l'auteur d'une motion portant sur l'ensemble d'un projet ou d'une proposition de loi en discussion n'est ni le Gouvernement, ni la commission saisie au fond, ni un groupe politique, la durée de son intervention et celle de l'orateur contraire est réduite de dix à trois minutes.
* S'agissant de l'article 12 de la résolution créant une motion tendant à ne pas examiner une proposition de loi déposée en application du troisième alinéa de l'article 11 de la Constitution (dans le cadre de la procédure dite du « référendum d'initiative partagée »), le Conseil juge que ces dispositions ont uniquement pour objet de garantir l'effectivité du droit reconnu à chaque assemblée d'obtenir l'organisation d'un référendum en refusant d'examiner une telle proposition de loi. Elles n'empêchent pas que, à la suite de l'adoption d'une telle motion, la proposition de loi soit de nouveau inscrite à l'ordre du jour du Sénat et que, à cette occasion, elle puisse faire l'objet de cette motion.