Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Communiqué de presse
Le Conseil constitutionnel juge conforme à la Constitution la prolongation, exceptionnelle et transitoire, d'un an du mandat de six sénateurs représentant les Français établis hors de France
Par sa décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020, le Conseil constitutionnel s'est prononcé sur la loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France, dont il avait été saisi par le Premier ministre conformément au cinquième alinéa de l'article 46 et au premier alinéa de l'article 61 de la Constitution.
Contrôlant notamment l'article 1er de cette loi organique, qui prolonge d'un an le mandat des six sénateurs représentant les Français établis hors de France élus en septembre 2014 et diminue d'autant celui de ceux qui seront élus en septembre 2021 pour les remplacer, le Conseil constitutionnel a rappelé que, selon l'article 3 de la Constitution, « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum. - Aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s'en attribuer l'exercice. - Le suffrage peut être direct ou indirect dans les conditions prévues par la Constitution. Il est toujours universel, égal et secret … » et que, aux termes des quatrième et cinquième alinéas de l'article 24 de la Constitution : « Le Sénat est élu au suffrage indirect … - Les Français établis hors de France sont représentés à l'Assemblée nationale et au Sénat ».
Le législateur organique, compétent en vertu de l'article 25 de la Constitution pour fixer la durée des pouvoirs de chaque assemblée, peut modifier cette durée dans un but d'intérêt général et sous réserve du respect des règles et principes de valeur constitutionnelle, qui impliquent notamment que les électeurs soient appelés à exercer, selon une périodicité raisonnable, leur droit de suffrage.
Le Conseil constitutionnel rappelle en outre qu'il ne dispose pas d'un pouvoir général d'appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement. Il ne lui appartient donc pas de rechercher si l'objectif que s'est assigné le législateur pouvait être atteint par d'autres voies, dès lors que les modalités retenues par la loi ne sont pas manifestement inappropriées à cet objectif.
Au regard du cadre constitutionnel ainsi rappelé, le Conseil constitutionnel juge que, dans la mesure où il assure la représentation des Français établis hors de France, le Sénat doit être élu par un corps électoral lui-même élu par ces derniers. Les sénateurs représentant les Français établis hors de France sont élus par un collège électoral composé des députés élus par ces Français, des sénateurs qui les représentent, des conseillers des Français de l'étranger et des délégués consulaires. Or, le législateur a, par l'article 13 de la loi du 22 juin 2020, reporté d'un an l'élection des conseillers des Français de l'étranger et des délégués consulaires, qui devait initialement intervenir en mai 2020. Ce report est justifié par les difficultés d'organisation de ce scrutin causées par l'épidémie mondiale de covid-19, auxquelles les modes de vote à distance applicables pour ces élections ne permettaient pas de remédier.
Le Conseil constitutionnel en déduit que le législateur organique a pu estimer que ce report devait également entraîner celui de l'élection des six sénateurs représentant les Français établis hors de France élus en septembre 2014 et qui devaient être renouvelés en septembre 2020, afin que ces sénateurs ne soient pas désignés par un collège en majeure partie composé d'élus exerçant leur mandat au-delà de son terme normal.
Le Conseil constitutionnel relève en outre que l'élection n'est reportée que d'une année. La prorogation des mandats sénatoriaux qui l'accompagne revêt un caractère exceptionnel et transitoire. Il en va de même de la réduction d'un an du mandat des six sénateurs qui seront élus en septembre 2021, qui est nécessaire pour conserver le rythme normal des renouvellements triennaux partiels du Sénat. Ainsi, les choix faits par le législateur organique ne sont pas manifestement inappropriés à l'objectif qu'il s'est fixé.
Pour l'ensemble de ces motifs, le Conseil constitutionnel juge que ces dispositions ne sont pas contraires à la Constitution.