Communiqué

Décision n° 2006-535 DC du 30 mars 2006 - Communiqué de presse

Loi pour l'égalité des chances
Non conformité partielle

Le Conseil constitutionnel a été saisi par plus de soixante députés et par plus de soixante sénateurs de la loi pour l'égalité des chances.
Par sa décision n° 2006-535 DC du 30 mars 2006, il a rejeté l'essentiel de leur argumentation.
Les requérants contestaient :
- L'article 8 relatif au « contrat première embauche » (CPE) ;
- L'article 21 sur le décompte des effectifs de l'entreprise pour les élections professionnelles ;
- Les articles 48 et 49 sur le « contrat de responsabilité parentale » ;
- L'article 51 relatif aux pouvoirs de transaction pénale des maires.
Faisant droit sur ce point aux requérants, le Conseil constitutionnel a censuré l'article 21, lequel était issu d'un amendement dépourvu de tout lien avec le projet de loi.
Pour le même motif, il a censuré d'office l'article 22.
Il a, en revanche, écarté les griefs dirigés contre l'article 8 (CPE).
S'agissant de la procédure législative, le Conseil a jugé que le Gouvernement avait pu régulièrement, au regard des règles posées par la Constitution, introduire cette disposition, quelle que soit sa portée, par voie d'amendement sans consulter au préalable le Conseil d'Etat.
Il a également estimé que la circonstance que plusieurs procédures prévues par la Constitution aient été utilisées, et notamment l'article 49, alinéa 3, n'était pas de nature à rendre inconstitutionnelle la procédure législative.
Sur le fond, si les requérants soutenaient que le CPE, réservé aux jeunes de moins de 26 ans, portait atteinte au principe d'égalité devant la loi, le Conseil a estimé, conformément à une jurisprudence constante, qu'aucun principe non plus qu'aucune règle de valeur constitutionnelle n'interdit au législateur de prendre des mesures en faveur de l'emploi des jeunes. Le législateur pouvait donc, compte tenu de la précarité de la situation des jeunes sur le marché du travail, et notamment des jeunes les moins qualifiés, créer un nouveau contrat de travail ayant pour objet de faciliter leur insertion professionnelle. Les différences de traitement qui en résultent sont en rapport direct avec la finalité d'intérêt général poursuivie par le législateur et ne sont, dès lors, pas contraires à la Constitution.
Si les requérants soutenaient que l'absence de motivation de la rupture du CPE pendant les deux premières années et l'absence de procédure contradictoire portaient une atteinte excessive au droit à l'emploi des jeunes, le Conseil a relevé que, par sa finalité, le CPE tendait à mettre en oeuvre, au bénéfice des jeunes, l'exigence du droit à l'emploi résultant du cinquième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946. Il a rappelé qu'il ne dispose pas d'un pouvoir général d'appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement. Il ne lui appartient donc pas de rechercher si l'objectif que s'est assigné le législateur pouvait être atteint par d'autres voies, dès lors que les modalités retenues par la loi déférée ne sont pas manifestement inappropriées à la finalité poursuivie.
Si les requérants soutenaient également que les salariés embauchés en CPE seraient privés de droit au recours, le Conseil a précisé expressément que toute rupture d'un « contrat première embauche » pendant les deux premières années pourra être contestée devant le juge du contrat. Il appartiendra à l'employeur, en cas de recours, d'indiquer les motifs de cette rupture afin de permettre au juge de vérifier qu'ils sont licites et de sanctionner un éventuel abus de droit. Le juge vérifiera notamment que le motif de la rupture n'est pas discriminatoire et qu'il ne porte pas atteinte à la protection prévue par le code du travail pour les femmes enceintes, les accidentés du travail et les salariés protégés.
Le Conseil a, enfin, rejeté les moyens tirés de la violation de la Convention internationale du travail n° 158, de la Charte sociale européenne et d'une directive européenne dans la mesure où, selon une jurisprudence constante, il ne lui appartient pas, lorsqu'il est saisi d'un recours tendant à contrôler la conformité d'une loi à la Constitution, de vérifier sa compatibilité avec les engagements internationaux et les obligations communautaires de la France.
S'agissant des articles 48 et 49, le Conseil a vérifié que les droits de la défense seront respectés si le président du conseil général est conduit à suspendre provisoirement le versement des allocations familiales aux parents qui ne rempliront pas leurs devoirs éducatifs tels qu'ils seront précisés dans un « contrat de responsabilité parentale » souscrit en raison de l'absentéisme scolaire de leur enfant ou des troubles causés par celui-ci à l'établissement.
Enfin, le Conseil a jugé conforme aux exigences constitutionnelles régissant la procédure pénale le pouvoir de transaction pénale accordé par l'article 51 aux maires en matière de lutte contre les incivilités ayant causé un préjudice à la commune.